"La littérature, il faut qu'elle reste dans les livres ... Ailleurs, elle est insupportable (...)"
A force de vous voir dévorer des bandes dessinées, j'ai eu envie de m'y mettre à mon tour ! Comme je n'y connais vraiment rien, j'ai demandé à mes copines lectrices de me souffler quelques conseils et c'est avec une petite liste que je me suis rendue dans ma bibliothèque municipale. Malheureusement, je n'ai pas trouvé la plupart de ces titres et les illustrations de ceux qui étaient bien dans les rayonnages ne me disaient rien. J'ai donc fouiné et je suis tombée sur un titre qui ne pouvait que m'attirer ! J'ai alors emprunté cette BD sans même l'ouvrir, me réservant une petite surprise (oui, j'aime bien me faire des surprises toute seule !!).
Cette bande dessinée s'ouvre sur une vignette de pleine page qui représente une montagne, en août 1944. Des villageois apeurés fuient dans le maquis quand, soudain, la seule jeune femme du groupe est touchée par une balle et meurt dans les bras d'un garçon de son âge. Au sortir de la guerre, ce jeune homme, Augustin Morel, seul rescapé de ce groupe de résistants, raconte son histoire dans un roman autobiographique intitulé Marianne, prénom de l'amour qu'il a perdu ce jour-là.
Devenu un vieil homme, Augustin vit loin de ce petit village de montagne et la solitude est devenue son refuge. Pourtant, une jeune cinéaste qui souhaite adapter ce roman au cinéma et le tourner sur les lieux de l'action, parvient à faire retourner Augustin dans ce petit village où son passé va lui sauter à la figure et remuer les souvenirs de toute une population.Le Vieil Homme qui n 'écrivait plus, de Sokal (éditions Casterman) est un récit complexe qui mêle les époques en alternant passé et présent, multiplie les points de vue (Augustin qui retrouve seul les lieux où il a tant aimé et où il a tant souffert ; les villageois qui commentent ce retour ; un inspecteur de police qui interroge les protagonistes ; l'équipe de cinéma qui tente de réaliser son projet ...), mais aussi passe du récit de la vie des personnages, au roman écrit par Augustin (des pages de son roman occupent des vignettes de la BD), au cinéma. L'intrigue est tout à la fois personnelle, historique, policière et le lecteur est tenu en haleine jusqu'au bout.
Le Vieil Homme qui n'écrivait plus est une histoire prenante, intense, qui plonge sans ménagement le lecteur au cœur des pages sombres et encore lourdes de secrets de la guerre telle qu'elle pouvait être vécue dans de petits villages. Les tensions que la guerre pouvait faire naître entre les habitants sont parfaitement dépeintes. Le poids du souvenir mais aussi l'inconscient collectif avec toute l'hypocrisie, la bêtise mais aussi la naïveté dont il est nourri, sont omniprésents, tant dans le récit lui-même que dans les dessins qui mettent en avant des visages burinés, usés, creusés par tous ces souvenirs qu'on ne chasse jamais définitivement.
J'ai donc dévoré cette bande dessinée, happée par cette histoire, et j'en suis ressortie toute troublée. J'ai néanmoins encore du mal à m'enthousiasmer pour les illustrations ... J'ose même dire qu'elles m'ont parfois gênée dans ma lecture tant elles ne sont pas ma tasse de thé et j'en reviens là à ce qui me rebute dans la bande dessinée en général ...