samedi 15 janvier 2011

Quand les livres ont des elles # 5


Après une petite pause, notre joli défi "Quand les livres ont des elles" revient !
J'en suis d'autant plus heureuse que j'ai été gâtée cette fois-ci par la lecture d'un petit livre que j'ai beaucoup aimé, au point d'en faire un coup cœur  mais avant que je vous en parle, place à mon invitée, Henriette, qui vous parle de sa lecture :

J’ai beaucoup aimé Peut-être une histoire d’amour. Contre toute attente. J’en suis même à dire vrai la première surprise.
En effet, après avoir lu les commentaires précédents, je craignais vraiment le flop. Un personnage immature et agaçant, une histoire qui commence juste au moment où le livre finit et vous laisse sur votre faim, voilà ce que je redoutais. Mais cela n’a pas été le cas. Au contraire, ce livre m’a vraiment beaucoup plu.
Je ne reviendrai que rapidement sur l’histoire elle-même, ce Virgile plaqué par téléphone par une femme qu’il ne connaît pas, car ce n’est pas dans l’ « histoire » en soi que repose pour moi l’intérêt et la grande réussite de ce roman, en tout cas pas au sens classique du terme. En apparence, en effet, si l’on tente de lister les péripéties, il ne se passe pas grand-chose dans ce roman. Quelques visites chez le psy, un week-end chez des amis, plusieurs tasses de thé, deux coups de fils à EDF et une descente de police, voilà à peu près ce à quoi se réduirait le schéma narratif. Une misère donc.
Mais les véritables péripéties, les vraies aventures, les itinéraires hasardeux, dangereux, surprenants, émouvants, que suit le personnage, sont tout intérieurs. Un peu à la façon des tropismes de Sarraute, ce sont les micros révolutions dans la conscience de soi et des autres qu’éprouve Virgile, l’évolution, le cheminement intérieur de cet être qui constitue la diégèse romanesque. Comment l’éternel looser amoureux, incapable de réussir une liaison, certain de l’échec avant même de commencer, sans aucune ambition personnelle, l’espèce de mort-vivant qu’est Virgile – mort de l’intérieur par peur de vivre en fait – va-t-il réussir à se transformer, c’est là l’enjeu du roman. Nous suivons donc son auto-analyse, son périple intérieur pour se connaître, se comprendre, et avancer, et ceci m’a tenue en haleine d’un bout à l’autre du récit.
Car l’enjeu de ce livre, à mon sens, ce n’est pas de savoir si Virgile a vraiment connu ou va vraiment connaître cette femme du message sur son répondeur. Avoir comme attente de lecture la réponse à cela, c’est inévitablement être déçu et rester sur sa faim. Le titre du reste le dit bien : Peut-être une histoire d’amour. Ce dont traite ce livre, c’est du passage d’un « jamais » à un « peut-être » justement : comment le personnage s’ouvre enfin à la possibilité. Pas à la certitude, non, à l’éventualité, donc au risque, à l’incertain enfin accepté avec son lot d’angoisses mais aussi d’exaltation. Comment Virgile se met enfin en mouvement vers la vie, comment il réussit à surmonter ses peurs pour cesser de survivre et oser vivre, voilà ce que nous raconte ce livre. Il nous laisse donc logiquement lorsque Virgile, enfin, est prêt à commencer à vivre, car c’est alors un autre propos.
Cette histoire et ce personnage m’ont beaucoup touchée. Un grand merci donc à celle qui a proposé ce roman et m’a offert ce beau moment de lecture.

***
Quant à moi, j'ai eu un grand coup de cœur pour L'éducation d'une fée de Didier Van Cauwelaert.
"(...) les seuls moments où j'avais l'impression que mon rôle n'était pas terminé, que mon sort n'était pas une impasse, que d'autres détours pouvaient me ramener à mon point de départ, c'était quand le regard sage et poli d'une inconnue au prénom d'homme tentait de deviner qui j'étais d'après le contenu de mon chariot. Elle me redonnait du mystère, des rallonges, m'essayait des identités, des existences possibles. Mais sans doute, là aussi, je me faisais des illusions. J'étais un client entre mille, (...) c'est pour rien que je changeais de peau en achetant des choses dont je n'avais nul besoin et que j'entreposais dans mon bureau, musée imaginaire, accessoires de vies que je n'avais pas choisies."  

Il y a de tout dans ce livre : de l'amour bien sûr, du désarroi aussi, de la magie beaucoup, de l'enfance, de la maladie, du mystère, de la guerre, de la prison, une cabane au fond d'un  bois, une femme au prénom d'homme, des espoirs et des malentendus, des fées évidemment et même ... des caddies, des pigeons et André Gide !

L'éducation d'une fée est un petit roman léger qui parle de choses graves, c'est un univers enfantin et parfois onirique qui raconte les douleurs de la vie, c'est une petit musique qui charme l'oreille du lecteur mais serre son cœur.
 
On sent que Didier Van Cauwelaert éprouve beaucoup de tendresse à l'égard de ses personnages, et c'est peut-être pour cela que ce roman est si doux alors même qu'il aborde des thèmes difficiles (la séparation, l'exil, la guerre en Irak la souffrance, la vie dans une cité difficile ...). Du coup, on lui pardonne une fin qu'on devine trop tôt et ce petit parfum d'eau de rose qui titille nos narines à certaines pages. On lui pardonne car ce roman est précieux : il nous rappelle qu'il suffit d'insuffler un tout petit peu de fantaisie dans nos vies pour que la magie opère, que le merveilleux se révèle et que l'enfant qui reste en nous l'emporte sur les difficultés du quotidien.
Merci à celle qui l'a choisi, c'est une belle découverte pour moi !

Deux belles lectures, donc, pour Henriette et moi : et les copinettes qu'ont-elles lu ? Qu'en ont-elles pensé ? Allons vite lire les billets de Sara, Rafafa, Dan et Gio !

6 commentaires:

Rafafa a dit…

Super que vous ayez eu ces coups de coeur!

Stephie a dit…

J'adore L'éducation d'une fée, que je relirai sans doute un jour. L'autre, je ne sais pas ;-)

sarah a dit…

En voilà un beau "double-billet"! Deux coups de coeur, bravo!
J'avoue que tu sais vraiment bien nous éclairer sur ce qui t'a plu dans "L'éducation d'une fée", Eloah.
Henriette : ton enthousiasme fait plaisir à voir!

dan a dit…

Deux très beaux billets, oui! Bravo les filles!

ELOAH a dit…

@ Rafafa : oui, ce sont des lectures qui font du bien.

@ Stephie : moi aussi c'est un livre que je relirai, d'ailleurs je vais me l'acheter.

@ Sarah et Dan : merci !

Henriette a dit…

Vraiment une très chouette idée, cette chaîne de lecture ! C'est très sympa de lire les avis de toutes sur les romans, puisqu'à présent on a fait le tour !