"Je sais enfin que je suis entre parenthèses. Moi, j'ai au moins cette chance. Je suis comme je suis parce que je suis en instance de vie. Une anorexique n'est pas en marge. Elle s'est faite aussi mince que le trait qui sépare la marge de l'espace où l'on écrit. Un jour ou l'autre, si tout va bien, elle revient sur la page. C'est ce que je m'efforce de faire."
Emma est une adolescente anorexique. Quand sa grand-mère meurt, elle découvre son journal intime dans lequel elle apprend que son grand-père faisait partie de la légion des volontaires français qui a collaboré avec les Allemands pendant la Seconde Guerre Mondiale et qu'il a ainsi contribué à la mort de très nombreux innocents. La jeune fille tente d'en savoir davantage et surtout de comprendre : les pages de récit alternent avec des extraits du journal de sa grand-mère, construisant ainsi comme un dialogue entre les générations, entre les histoires., mais aussi, étrangement, entre les questions d'aujourd'hui auxquelles des réponses d'hier sont enfin apportées. Peu à peu la jeune fille réalise que son propre corps reproduit ce qu'ont subi les déportés dans les camps, notamment dans celui dont son grand-père était le gardien : Sobibor.
Elle décide de dire à son grand-père ce qu'elle sait et de livrer le journal à la justice, se libérant ainsi de la maladie que son inconscient lui a fait porter comme si une faute avait enfin été expiée, même si les conséquences de ce face à face avec son grand-père seront tragiques ...
Au-delà de l'émotion très forte qui saisit le lecteur de la première à la dernière page, ce récit pose d'intéressantes questions sur le poids des secrets de famille même à travers les générations, sur la mémoire collective, sur le choix de vivre avec ou de se révolter. L'auteur, Jean Molla, un homme adulte donc, trouve les mots justes pour faire entendre la voix de cette toute jeune fille qui regarde son corps maltraité par la maladie, qui décrit ses émotions d'enfant contrainte à grandir trop vite, qui doit affronter la solitude pour trouver des réponses à ses nombreuses questions avant de pouvoir, enfin, libérée, s'ouvrir au monde. En même temps, Jean Molla s'est livré à un patient travail d'historien pour collecter le peu d'informations disponibles sur le camp polonais de Sobibor (seul camp où des déportés se sont insurgés) pour écrire la trame historique de son roman.
Un roman à mettre entre toutes les mains à partir de 14 ou 15 ans.
4 commentaires:
Je l'ai lu et relu, et toujours apprécié. J'ai d'ailleurs écrit un petit billet sur ce roman la semaine dernière (les grands esprits se rencontrent ;-)) Mes élèves de 3èmes y ont été très sensibles, comme je m'y attendais...
je l'adore aussi ce roman !
bises !
J'aime beaucoup ce roman, je le fais souvent lire à mes élèves de 3° aussi.
@ Dan : mince, j'ai raté ton billet, il faut que j'aille lire ça !
@ Tanaquil : bises aussi, on a bon goût hein quand même :-)
@ Dolly : c'est justement en entendant une élève de 3è en parler que j'ai eu envie de le relire !
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