"(...) ce mur était son rempart contre la ville, contre la foule, et ce visage était son horizon. C'est que les larmes qui sourdaient de ce rêve étaient les siennes - purifiées, magnifiées. Toutes les larmes enlisées dans son cœur, et qu'il n'avait pas su verser. C'est qu'il avait déposé derrière cette face muette la lancinante rumeur du désir que son corps et son sang d'homme minime ne pouvaient plus depuis longtemps contenir et endurer. C'est que ce grand visage mural était un suaire dont le sourire masquait la fadeur de ses jours, le vide de ses nuits."
Il est des romans qu'on ne peut résumer sans les trahir, sans les abîmer et Opéra muet est de ceux-là ... Gabriel est un homme d'images, un homme de visions : photographe, il mène une vie solitaire à l'ombre du portrait du Docteur Pierre qui orne le mur de l'immeuble d'en face et est devenu son compagnon. La démolition de cet immeuble entraîne l'effondrement du mur métaphorique que Gabriel s'est construit et qui le protège aussi bien de l'extérieur que de lui-même, de son passé, de ses émotions. La perte du Docteur Pierre réveille en lui d'autres pertes dont il n'a su réellement faire le deuil, celle de sa grand-mère, celle d'Agathe qui reviennent alors le hanter comme des fantômes qui n'attendaient qu'une occasion pour se manifester. Paradoxalement, la démolition de ce mur l'ouvre aux autres car elle lui fait découvrir ses voisins d'en face qu'il se met à observer la nuit, en cachette ; lors d'une de ses errances, elle lui fait également rencontrer une étrange femme, elle-même en quête de son passé ; mais plus il s'intéresse aux autres, plus il se retrouve pour se perdre à nouveau en lui-même, jusqu'à disparaître à son tour, de manière très singulière.
C'est un récit très poétique, presqu'onirique. Les pensées, les rêves éveillés, les cauchemars de Gabriel se confondent parfois tant ils sont finalement l'expression d'un même égarement. L'écriture de Sylvie Germain est magnifique et malgré la brièveté de son récit je l'ai lu très lentement, dégustant chaque phrase, revenant souvent en arrière. Ce style participe d'ailleurs à l'atmosphère fantasmagorique du récit.
Sylvie Germain a raconté que le soir même de la soutenance de sa thèse, désemparée de ne plus avoir de prétexte pour écrire, elle s'est mise à composer des nouvelles et des récits pour enfants. Quand on lit Opéra muet, on sent précisément ce besoin viscéral de l'écriture et c'est sans doute ce qui fait que le lecteur a le sentiment que cette écriture vient de si loin, du plus profond d'un être.
C'est un récit très poétique, presqu'onirique. Les pensées, les rêves éveillés, les cauchemars de Gabriel se confondent parfois tant ils sont finalement l'expression d'un même égarement. L'écriture de Sylvie Germain est magnifique et malgré la brièveté de son récit je l'ai lu très lentement, dégustant chaque phrase, revenant souvent en arrière. Ce style participe d'ailleurs à l'atmosphère fantasmagorique du récit.
Sylvie Germain a raconté que le soir même de la soutenance de sa thèse, désemparée de ne plus avoir de prétexte pour écrire, elle s'est mise à composer des nouvelles et des récits pour enfants. Quand on lit Opéra muet, on sent précisément ce besoin viscéral de l'écriture et c'est sans doute ce qui fait que le lecteur a le sentiment que cette écriture vient de si loin, du plus profond d'un être.
Un récit poétique !
3 commentaires:
Oh, billet très tentant !
J'ai adoré "Magnus". Je note !
Ca me fait plaisir de te donner envie de lire. J'ai vraiment aimé ce livre !
Je n'ai jamais lu Sylvie Germain, mais Magnus m'attend et je ne devrais pas tarder à le lire...
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